jeudi 13 décembre 2012

en avant-première...

En avant-première, voici les premières lignes du troisième volume des aventures de Soren, qui s'intitule "Sous le regard de l'hydre" (terminé récemment mais pas encore publié : croyez bien que j'espère y remédier).


« Le convoi des glaces »


Un vent polaire balayait impitoyablement la banquise, soufflant avec violence des esquilles de glace qui vous lacéraient la peau comme des lames de rasoir. Les bourrasques furieuses s’engouffraient dans les étoffes, secouaient les traîneaux, menaçant à chaque instant de les renverser.
 "Les hommes et les montures courbaient l’échine face à la colère du grand Nord, tels des insectes dans la paume d’un géant. La température était si basse que le mauvais acier devenait cassant, que les sourcils gelaient, que la moindre parcelle d’épiderme devait être soit couverte, soit enduite d’une graisse noire et collante, sous peine de se craqueler séance tenante.
Soren se prit à regretter brièvement la chaleur des jungles du Seshwan… ou plutôt d’« Almaris », comme on disait à présent que ces terres avaient été définitivement conquises par les armées d’Aposphir…
Pour lui, le « pays de l’aube » évoquerait toujours les ténèbres les plus absolues. Le tremblement qui secoua sa main droite n’avait rien à voir avec le froid : c’était apparu après tout cela… Un tremblement incoercible qui le prenait chaque fois qu’il se laissait aller à penser à… à…
De son autre main, il plaqua rageusement contre lui son membre tremblant.
Il est difficile d’imaginer le néant des déserts glacés du Nord d’Aeviris : un horizon étal, scintillant, à la beauté fatale, une mer d’albâtre aux vagues éternellement figées. Il y régnait parfois une lumière si pure, si vive qu’il fallait se garder de la fixer sous peine d’y perdre la vue. Il arrivait aussi que les ténèbres s’installassent sans crier gare, portées par la tempête : dès lors, toute lumière semblait avoir déserté le monde, emportant avec elle jusqu’à la plus infime lueur d’espoir.
Rien ne bougeait à la surface des étendues glacées, à l’exception des paquets de neige indurée que le vent charriait. Pourtant, la Mort Blanche avait échoué dans sa tâche : la vie subsistait sous la glace. Une vie rude, endurante, qui avait su passer les épreuves de l’enfer immaculé.
Une vie qui expliquait la présence de Soren en ces lieux inhospitaliers."